Notre jeunesse

Il y a un paradoxe qu’il faudra bien affronter un jour: pourquoi la jeunesse de Macron ne se reflète pas dans la composition sociologique de son mouvement ? Pourquoi le grand âge de Mélenchon est-il si attractif pour la jeunesse ? La raison qui vient à l’esprit en premier lieu est évidente: chacun offre le reflet à ses électeurs de ce à quoi il aspire. D’un côté, l’ardeur de la jeunesse de ceux qui, ayant connu le mythe de 68, y croient comme un facteur de l’action. De l’autre, la sagesse de ceux qui, ayant été bercé par le mythe de 68, cherche le témoignage de ceux qui l’ont vécu. Mais ce qui est fascinant, ce sont les conclusions radicalement opposées auxquelles parviennent les deux mouvements quant à la nature de l’action à mener. Les premiers marchent pour le maintien d’un certain état de choses et luttent de tout leur corps contre le changement. Les autres appuient de toute leur âme pour la rupture.

Il est probable que Maffesoli a raison quand il décrit que l’un des caractères propres de la post-modernité se concentre sur la tribalisation des moeurs. Sauf erreur de ma part, cet éternel retour à un état primitif senti par les sujets-vivants comme une évolution naturelle est un trait caractéristique de toutes les descriptions de l’éternel retour des arcs civilisationnels. Et plutôt que de le subir, en se braquant sur des positions dont nous savons par définition qu’elles sont vouées à l’extinction, il vaudrait mieux les anticiper.

Autrement dit, partant d’un constat réactionnaire, adopter une attitude profondément innovante - et donc en rupture.

La tribalisation des moeurs est à l’oeuvre en ce moment: ne survivront de la tragi-comédie politique à laquelle nous assistons que ceux qui appartiennent à un camp, à une famille, à un groupe dont ils sont porteurs non pas des valeurs, des idées, des sensibilités, mais bien de la cohésion autour d’un sentiment narcissique. Je suis l’histoire !

Ceux qui, à la dérive entre deux eaux, pensent que la bohème est encore une valeur post-moderne se trompent lourdement sur le sens de l’histoire car la non appartenance - qui est un refus de l’identité - est une déshérence: c’est-à-dire encore, étymologiquement, le refus de donner quoi que ce soit en héritage à ses descendants.

Ce contre quoi se révolte la descendance.

Xavier-Laurent Salvador